Consensus, contrat social et vivre ensemble

Un tel sujet, nous pousse au préalable à admettre deux remarques introductives. La première, est que l’on parle en termes de subordination plutôt que d’intersections du rapport du consensus au vivre ensemble.
Posant chacun une problématique originale et créant un segment commun par leur intersection. Ce n’est pas seulement d’une intersection entre celui du consensus et celui du vivre ensemble qu’on va discuter: mais de l’intersection entre trois sphères : consensus, vivre ensemble et contrat social en nœud borroméen.
Si on procède ainsi, c’est parce qu’on attend de la comparaison entre consensus et contrat social le moyen pour spécifier le vivre ensemble, afin de le mieux confronter ensuite au consensus.
Pour mieux distinguer le consensus du contrat social, examinons l’hypothèse inverse qui ferait du consensus une simple variable de contrat social. D’une part, le consensus est « l’Accord explicite ou tacite des membres d’un groupe ou d’une société, sur des valeurs, des règles ou des décisions communes». D’autre part, le contrat social est « le fondement d’une société civile qui se serait formée suite à un « contrat » passé entre individus consentants en vue de former une association, entre un corps collectif et le souverain ou l’État, réunis en un corps politique unique, permettrait de garantir la paix sociale mais aussi la légitimité du souverain ».
Dans la société, le citoyen cherche sa survie ou son bonheur dans le consensuel : vivre sa vie privée (son individualité- sa citoyenneté) tout en cherchant le bien être, la sécurité …dans le groupe.
Dans ce brassage de luttes et de compétition ou les couches et les clans s’affrontent sans arbitrage pour conquérir, garder ou reprendre le pouvoir, le citoyen dans la société reste mitigé entre le propre et l’aliénation. Ceci démontre que l’aliénation dans le consensus ne peut que refléter l’aliénation du contrat social, et par la même, la réduction du consensus au contrat social. Ce qui nous ramène à poser la question suivante: Dans quel sens faut-il dire que c’est le consensus qui organise la société ?
Devant l’impossibilité de retourner à la pure nature, il conviendrait de trouver une forme d’association qui défend et protège la personne et les biens de chaque associé qui ne peut suffire seul à ses besoins, et qui fait que les antagonistes dépendent tous les uns des autres.
Cette dépendance entraîne nécessairement des devoirs mutuels, appropriés à l’intérêt général, conformes à la loi dont l’égalité des droits, assurée par l’indépendance de la justice, et la garantie de l’égalité, et que le gouvernant soit mené à observer certaines règles légales qui limitent son arbitraire.
La question est donc comment chercher non à éliminer les conflits, mais à inventer les procédures leur permettant de s’exprimer d’une manière pacifique, et de permettre l’existence libre de discussion organisée pour des solutions négociées.
L’autre question est liée à la séparation des pouvoir (législatif, exécutif et judiciaire), et au caractère indiscutable de l’indépendance des juges.
Ce sont ces conditions qui assurent la participation à la décision pour un nombre toujours plus grand de citoyens. Le régime demeure responsable de la diminution de l’écart entre le gouvernant et le gouverné. Les citoyens obéissent à la loi, les magistrats obéissent à ces mêmes lois régies par les citoyens à travers leurs représentants élus. C’est le règne où chacun serait à la fois sujet et souverain.
Soyons aussi attentifs à l’intersection et en même temps, à l’inéluctable différence entre le consensus, le contrat social et le vivre ensemble. Ce sont trois anneaux entrelacés de telle sorte que briser l’un d’entre eux, quel qu’il soit, sépare les deux autres.
Saïd Ghodebane
Le processus constituant comme alternative à l’impasse multidimensionnelle